Costa Rica, péninsule de Nicoya, province de Guanacaste. Écoutez ! Dans le village de Guaitil, seuls le léger souffle du vent et l’odeur de l’argile suscitent votre attention. Pourtant, le cœur du village bat au rythme des tours des potiers. L’art de la terre cuite, ancestrale, culturelle et profondément inscrite dans l’ADN du peuple chorotega, berce les journées des indigènes. Les poteries de Guaitil, céramiques d’origine précolombienne, portent en leur sein de multiples enjeux. Entre flambeau du patrimoine d’un peuple et reflet d’un savoir-faire centenaire, faites le tour du potier, pardon du sujet, et laissez-vous modeler par les mains expertes de cet article.
Poteries de Guaitil – Des matériaux de San Vicente de Nicoya
La poterie chorotega n’utilise que des matériaux locaux. Aujourd’hui, la plupart des objets pour touristes sont décorés avec des peintures chimiques et recouverts de vernis pour une meilleure brillance. Les chorotegas, eux, collectent l’argile dans les montagnes costaricaines environnantes, celles de San Vicente de Nicoya, plus exactement. Les artisans la chargent sur une charrette tirée par des bœufs, conformément aux méthodes ancestrales, et la ramènent au village de Guaitil.
Pilonnée avec un mortier de bois massif et filtrée au tamis (une toile), l’argile est alors mélangée à du sable appelé « sable des iguanes ». Puis, comme le veut la tradition, à force de pelles et de gestes précis, elle est incorporée à l’eau et foulée au pied par le potier. Puis, telle une pâte à tarte, elle est malaxée, roulée jusqu’à pouvoir être modelée.
L’argile est ensuite tournée pour créer la sculpture elle-même. Les artisans indigènes polissent leurs œuvres avec des « zukias ou sukias », pierres servant de meules.
La cuisson, à basse température, se déroule en extérieur, dans un « borno », four traditionnel en forme de dôme. Les poteries sont enveloppées dans des combustibles, d’où les dépôts noirs.
Enfin, les motifs décoratifs sont tracés sur la céramique partiellement sèche à l’aide de matières entièrement naturelles. Éponges, pinceaux se laissent guider par les doigts précis pour former les dessins animaliers totémiques.
Tout ce procédé rend la poterie de Guaitil et ces pièces absolument uniques.
Le saviez-vous ?
- Un récipient cuit à basse température est plus solide. Il ne casse que s’il se trouve au contact direct d’une flamme.
- L’argile sert aussi à fabriquer des tuiles pour les toits des maisons.
Connexion aux Chorotegas par un savoir-faire ancestral
D’où viennent cette passion et ce savoir-faire ? C’est Johnny Sanchez Grijalva, artisan chorotega à Guaitil, qui, assis devant son tour de potier, nous explique. Il a toujours vécu dans ce village typique, peuplé d’indigènes. Il se souvient très bien avoir tout appris de sa grand-mère, dès l’âge de 11 ans. À ses yeux, exercer ce métier va au-delà d’assouvir une passion. À travers ses poteries, il perpétue la richesse de ses ancêtres. Travailler la céramique, c’est voyager dans le temps. Il nous confie que lorsqu’il malaxe l’argile ou qu’il peint ses poteries, il retrouve son aïeule. Elle est là, tout près, le regarde, le guide et le protège dans ses créations. Il n’envisage même pas d’exercer ce métier ailleurs que dans cet atelier de Guaitil.
« Je remonte le temps et retrouve ma grand-mère »
Assiettes, pots, plats, jarres, figurines de faune costaricaine se côtoient sur les étagères de la boutique. Quetzals, toucans, oiseaux tropicaux, arabesques, tous de noir, blanc et rouge vêtus décorent ces centaines de pièces d’artisanat d’art de couleur ocre ou noire. On dit même que les chamanes bénissent les poteries.
Guaitil – Un village costaricain aux enjeux multiples
« Le plus important est de préserver ma culture. »
Poteries de Guaitil, un achat écoresponsable
Autrefois destinées aux habitants du village, les poteries de Guaitil se vendent aujourd’hui à tous et notamment aux touristes. Les ustensiles de cuisine et instruments utiles laissent la place à des objets de décoration et bibelots en tous genres. Pour autant, perpétuer la tradition reste un enjeu crucial. L’idée n’est pas d’attirer un tourisme de masse et produire en grande quantité au détriment du savoir-faire. L’âme chorotega investit chaque sculpture, moule, plat et il appartient à chacun de respecter cet aspect.
C’est pourquoi il est primordial de se renseigner sur l’atelier de poterie pour contribuer à la promotion du patrimoine de Guaitil et à la juste rémunération des céramistes et de ce métier d’art.
Perpétuer la culture chorotega
Ethnie originaire du Mexique et du Nicaragua, les Chorotegas s’installent vers le Ve siècle au Costa Rica et au Honduras. Ils pêchent, chassent et cultivent maïs, manioc et tabac. Les femmes, elles, confectionnent les célèbres poteries. Leurs prêtres sont réputés experts en astronomie et mathématiques. De religion polythéiste, ils vénèrent, entre autres :
- le dieu Tipotani considéré comme le créateur ;
- le dieu Nenbithia et la déesse Ninguitamali, couple divin incarnant le soleil et la lune.
Cette communauté indigène compterait, à ce jour, entre 500 et 1 000 âmes réparties sur un territoire d’environ 2 000 hectares. Le GITPA (Groupe International de Travail pour les Peuples Autochtones) dénombre 8 peuples au Costa Rica. Les Chorotegas représentent 2,4 % de la population nationale en 2021. 35,5 % d’entre eux vivent en dessous du seuil de pauvreté, d’où l’importance de favoriser le commerce équitable. Malgré la loi indigène de 1977, la lutte pour la reconnaissance des terres et le règlement des dettes de l’État envers les peuples autochtones reste d’actualité.
Les autres peuples du Costa Rica
Céramiques mais pas que – Idées de Souvenirs écocitoyens à ramener du Costa Rica
Si les poteries de Guaitil combinent beauté, praticité (car oui, elles entrent dans la valise) avec objet typique et pittoresque, voici quelques idées pour ramener un peu de Costa Rica au fond de vos poches de voyageurs écocitoyens :
- les molas : tissus traditionnels des Indiens de la péninsule de Nicoya ;
- les masques de la tribu Boruca ;
- sujets en bois marimba (typique du Guanacaste) ;
- café, chocolat, etc.
Nos préférés ?
- un arbre à planter sur place pour participer à la reforestation costaricaine. On vous transmet les coordonnées GPS pour que vous puissiez suivre sa croissance ;
- la vidéo d’un singe hurleur qui accompagne votre petit-déj ;
- le souvenir d’un moment de yoga et de reconnexion à la nature.
À l’inverse, s’il vous plaît, boycottez les objets réalisés avec des écailles de tortues, de la fourrure de félin ou des plumes de quetzal.
Vous le savez, nous proposons des séjours au Costa Rica pour voyager autrement. Les poteries de Guaitil, outre un divertissement pittoresque, se veulent une vitrine de la culture autochtone amérindienne. Ces céramiques portent en elles le cœur des Choteregas. Elles transmettent le souvenir de leurs ancêtres et représentent une clé majeure de l’avenir de leurs descendants.
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Sources :
Témoignage de Johnny Grivaljo, potier chorotega
Document du GITPA